Mes profs
Cette photo fut pour moi une découverte d’une valeur inestimable, elle m’a rajeuni de 38 ans. Le Monsieur assis avec une djellaba blanche, était mon professeur à l’école primaire (CP).Je me souviens très bien de lui parce qu’il est l’auteur de ma premièreraclée, et la dame assise 3ème de droite était mon enseignante en CE1. C’était l’ère de mon initiation à l’école, les années où j’apprenais mes premiers mots d’arabe et de français, où j’écrivais mes premières syllabes et réussissais tant bien que mal mespremiers calculs, du temps quand l’école publique était simple mais fière, élémentaire mais efficace. Lorsque les enseignants étaient plus que des parents pour leurs élèves, quand nos vénérés professeurs étaient de véritables chevaliers qui ramonaient notre ignorance et éclairaient nos petits esprits.
En regardant cette belle photo, il y’a de la nostalgie qui coule à flots dans mes souvenirs, mais pas seulement, il y’a aussi de l’inquiétude qui me ronge : de quoi sera fait l’avenir de nos enfants ? Cette école publique qu’on a étranglé jusqu’à l’agonie, cette brave institution qui a formé des générations de cadres et de citoyens responsables, ce service publique et gratuit qu’on a sciemment transformé, à coups de réformes inutiles et répétitives coutant des milliards, en deriches usines à fabriquer des étudiants multi performantssans âmes et sans culture. Et cet hôpital public qu’on a mis en mort cérébrale sous respiration artificielle en attendant l’arrêt cardiaque salvateur. Il faut dire que notre tristement célèbre ministre s’y connait très bien en coma et en euthanasie, il aura ainsi le mérite d’avoir signé l’arrêt de mort de ce secteur déjà moribond en lui tirant une balle à bout portant pour l’offrir à des mastodontes sans scrupules et sans merci…. En plus de l’enseignement et la santé, nos enfants auront probablement à payer l’oxygène et les rayons du soleil.
En regardant de très près la photo, un détail d’une importance capitale attire mon attention, dans la petite ville (pour ne pas dire petit village) où j’ai grandi, à l’école primaire où j’ai fait mes premiers pas vers la connaissance et le savoir, mes enseignants étaientbeaux, bien habillés, de façon simple, peut-être, mais propre et élégante.Aucune des sixmaitresses ne portait un voile, et aucundes treize maitres n’était barbu, chose qui ne les a jamais empêchés d’être intègres, affectueux, rigoureux, respectueux et respectés.
Nous sommes en 1978, le quota homme femme était déjà bien respecté. Les femmes sont assises, et les hommes sont debout (sauf pour Si Ahmed qui ne pouvait pas), la galanterie était monnaie courante, le respect mutuel un principe fondamental, etla rigueur n’était pas une extravagance. C’était à mon sens la belle époque, des années lumières avant l’invasion de nos écoles et de nos administrations par des poils et des bouts d’étoffes, importés d’orient, à la propreté bien douteuse.
في الصميم
Published by Benyacob Abdelhalim … - Les Délires de Benyacob Abdelhalim